Catégorie : Industriels
Oui j’ai peur que YARA explose
Au vu du rapport que l’inspection DREAL vient de diffuser sur Géorisques, il me semble raisonable, logique, de craindre que YARA n’explose et par effet domino que la région de Saint-Nazaire soit défigurée.
Une fuite d’acide sulfurique à 96%, la n-ième en 2 ans ! tellement banal qu’on ne les compte plus.
Le plus inquiétant est dans les détails et les réponses proposées par YARA.
Deux points ont attiré mon attention :
1) La fuite concerne une tuyauterie qui a été changée 45 jours avant l’accident suite à un incident au même endroit.
On peut penser que la tuyauterie en place était neuve et donc que son épaisseur était normale.
Et pourtant, face à ce problème, la solution proposée par YARA consiste à regarder si les tuyauteries en place ont la bonne épaisseur avant de redémarrer. Logiquement, ça va péter au même endroit dans 45 jours.
Certes la DREAL a demandé de chercher à comprendre et de « justifier que l’ensemble des tuyauteries d’acide sulfurique résiste » . Très Bien.
Mais l’absence de prescription contraignante, l’absence d’interdiction de redémarrage des installations tant que l’on n’a pas compris la cause des dégradations et de fuites font que le risque de récidive est toujours là !
Les associations ont bien raison de demander une suspension administrative tant que tout n’est pas sous contrôle !
2) Le management des opérations lors de cet accident est dramatiquement inquiétant :
Comment peut-on admettre cela sur un Site Seveso Haut ? que le traitement d’un tel accident ne soit pas piloté par un leader responsable formé selon des procédures muries !?
Le rapport d’inspection est alarmant sur ce point : il rappelle que le POI prévoit un tel mode opératoire, mais la réalité semble être toute autre, avec un individu isolé, sans doute de bonne volonté, qui va seul lutter contre la fuite d’acide.
Qu’il n’y ait pas de suites préfectorales, et que l’on se limite à recommander qu’une réflexion sur la mise en œuvre du POI soit menée parait bien décalé.
Là encore, le bon sens en gestion de risques, c’est que l’usine soit suspendue tant que la capacité opérationnelle de mise en œuvre du POI n’a pas été prouvée !
=> Monsieur le Directeur d’INERIS Institut national de l’environnement industriel et des risques,
Considérez-vous que le risque de récidive est faible ?
=> Monsieur le Sous-préfet, Monsieur le DGPR, au vu des ces constats,
N’y-a-t-il pas urgence à appuyer sur le bouton « PAUSE » ?
Après YARA, les Chantiers de l’Atlantique sont mis en demeure
Le site de la préfecture relatif aux arrêtés vient de publier ce jour 28/07/2023 une mise en demeure des Chantiers de l’Atlantique.
Elle ne concerne pas les pollutions des sols de 2022 (cf article précédent) mais l’application des Meilleures Techniques Disponibles (les MTD), en français les Bonnes Pratiques, relatives aux activités de peinture et de traitement de surface utilisant des solvants, qui ont été définies au niveau européen en 2020 avec une application en France confirmée par l’arrêté du 3 février 2022 , lui même confirmé par l’arrêté du 7 juillet 2023 qui fait prévaloir les valeurs limites d’émission prévues dans l’arrêté de 2022 applicable aux installations IED du secteur du traitement de surface relevant de la rubrique 3670 sur celles existant dans l’arrêté de 1998.
Que voit-on dans les « Vu » de cette mise en demeure ? que les Chantiers, à l’instar de YARA ?, ont réussi à faire attendre la DREAL plus de 12 mois sans produire le « rapport de base » demandé dans le cadre du re-examen de la pollution des sols , des eaux demandé par la Directive IED (cf le guide méthodologique).
Être mené en bateau par un chantier naval c’est normal ?
Et que prévoit l’article premier de l’arrêté : un délai supplémentaire de 3 mois.
Espérons que le nouveau sous-préfet ne devienne pas complice d’un ping-pong sans fin « à la YARA ».
Sur le fond, on peut comprendre que les Chantiers ont des difficultés pour fournir tous les éléments sur leurs émissions de Composés Organiques Volatils (COV) sur leur site très important en surface et en nombre de sources de polluants.
C’est d’ailleurs pour cela qu’il apparait plus pertinent, au regard de la surmortalité prématurée constatée dans la CARENE, de dépenser un peu de temps et d’argent pour mesurer, non pas les émissions, les causes de la pollution, mais plutôt les effets à savoir les concentrations de COV dans l’air qui est respiré hors site (et sur site pour les employés) et dans les eaux souterraines et les puits des riverains.
Osons penser que le sous-préfet, au bout de 3 mois, prescrira aux Chantiers, mais aussi aux autres grands émetteurs de polluants cancérogènes (AIRBUS, MAN, CHARIER, etc ..), la réalisation de mesures dans le cadre de Plan de Surveillance Environnementale pérenne avec des mesures en continu de Benzène, de poussières, et de Métaux. ( cf proposition)
Un plan de surveillance a été prescrit à TOTAL pour Donges dès 2005 ….
Pourquoi pas à Saint-Nazaire dès 2023 ?
Gestion de déchets SUEZ dans la zone de BRAIS
La récente inspection de SUEZ RR du 31/05/2023 par la DREAL confirme la présence de Composés Organiques Halogénés Volatils (COHV) et de métaux dans les eaux souterraines sur le site rue Alfred Kastler. A savoir du cis 1,2 – dichloroéthylène (ou cis-1,2-Dichloroéthène) et du manganèse.
A l’occasion de l’inspection du 17/10/2022, il avait été demandé à SUEZ de rechercher la « potentielle source de COVH « , de « déterminer l’étendue du panache de pollution« , et d’identifier les « usages sensibles en aval hydraulique du site« .
Sept mois après, pas d’arrêté préfectoral de mise en demeure, pas de sanction => pas d’avancées sur ces pollutions et leur impact potentiel sur les populations voisines !
A la date du 31/05/2023 l’exploitant déclare qu’il a identifié une possible source, la société FAMAT et que les 2 autres points vont être réalisés mais aucun prestataire n’a été choisi !
Étonnant pour une société qui affiche sa responsabilité sociale et son ambition pour la préservation de la biodiversité ?
Concernant la source potentielle citée, FAMAT, située au nord de l’Exploitant, il convient de rappeler que la pollution des eaux souterraines par FAMAT au trichloroéthylène était plutôt au Nord-Ouest de FAMAT. Un rapport de 2018 sur la surveillance des piézomètres était optimiste quant à l’atteinte du seuil de dépollution. Malheureusement nous n’avons pas eu accès à des documents plus récents.
En 2015, pour une Évaluation Quantitative des Risques Sanitaires (EQRS), il avait été installé des piézairs pour mesurer les émanations de gaz. Du tétrachloroéthylène, du trichloroéthylène avaient été détectés mais pas de cis 1,2-dichloroéthène (page 14/72).
A proximité de Suez, on trouve aussi Ouest Coating connu pour ses activités de traitement de surfaces avec des émissions de métaux lourds, mais aussi un site DAHER et depuis peu un site de SIMRA dans les locaux de FAMAT. DAHER et SIMRA n’ont pas, à notre connaissance, fait l’objet d’inspection récente.
Pour mémoire, une inspectrice du travail avait mentionné l’utilisation fréquente de Diestone par SIMRA (zone de Brais).
Il serait pertinent d’avancer rapidement sur l’étendue du panache de pollution au regard de la présence d’habitations à quelques centaines de mètres de SUEZ.
Selon la carte INFOTERRE ci-dessous, il se pourrait qu’il y ait des puits privés à proximité.
Concernant le manganèse, l’inspection note que les rapports d’activité de l’exploitant en mentionne la présence en 2002.
Certes, mais à des concentrations faibles, comme le montrent les documents numérisés disponibles en ligne pour les piézos amont et aval :
avec des valeurs inférieures à 23 µg/l en 2002 et à 10µg/l en 2003 et 2004,
très inférieures aux valeurs constatées en 2022 et 2023 sur le piézo Aval (448 et 179 µg/l).
La recherche de sources pourrait complémentairement s’appuyer sur l’analyse des documents d’entrée des déchets à la recherche de déchets chlorés et/ou comportant du manganèse.
A lire : le monde diplomatique
Quand l’État protège les pollueurs
Au risque de la catastrophe industrielle
Obnubilées par la question de l’emploi, les autorités françaises privilégient les industriels au détriment de l’environnement et de la santé publique. Contrôles insuffisants, sanctions dérisoires, non-application des textes réglementaires, culpabilisation des populations affectées par la pollution : la palette des indulgences est large, comme l’illustre la situation dans l’ouest de la France
https://www.monde-diplomatique.fr/2023/07/FERNANDEZ/65935
pour preuve, examinez les rapports d’inspections publiés sur géorisques
Index of /inspections
80% détectent des anomalies « susceptibles de suites » proposées par la DREAL.
Combien d’arrêtés préfectoraux donnent une suite contraignante
qui ne soit pas un simple délai (3, 6, voire 9 mois) ?
Moins de 5%.